rosestella said:vous violez la seule règle que j'ai décrété ds ce forum
pas de foot
Le football est un système de signes, c'est à dire un langage.
Il possède toutes les caractéristiques fondamentales du langage par excellence, celui que nous prenons tout de suite comme terme de comparaison, à savoir le langage écrit-parlé.
En effet les "mots" du langage du football se forment exactement comme les mots du langage écrit-parlé.
Or, comment se forment ces derniers ?
Ils se forment par ce qu'on appelle la "double articulation", c'est à dire par les combinaisons infinies des "phonèmes", qui sont, en français les 26 lettres de l'alphabet.
Les "phonèmes" sont donc les "unités minimales" de la langue écrite-parlé.
Et si nous nous amusions à définir l'unité minimale de la langue du football ?
Voilà : "un homme qui utilise ses pieds pour frapper un ballon" est cette unité minimale : ce "podème" (si nous voulons continuer à nous amuser).
Les possibilités infinies de combinaison des "podèmes" forment les "mots du football" : et l'ensemble des "mots du football" compose un discours, réglé par de véritables normes syntaxiques.
Les "podèmes" sont au nombre de vingt-deux (à peu près autant que les phonèmes) : les "mots du football" sont potentiellement infinis, parce que infinies sont les possibilités de combinaison des "podèmes" (à savoir, dans la pratique, des passes de ballon entre joueurs); la syntaxe s'exprime dans le "match", qui est un véritable discours dramatique.
Les codeurs de ce langage sont les joueurs ; nous, sur les gradins, nous sommes les décodeurs : nous avons en commun un code.
Qui ne connaît pas le code du football ne comprend pas le "signifié" de ses mots (les passes) ni le sens de son discours (un ensemble de passes).
Je ne suis ni Roland Barthes ni Greimas, mais comme amateur, si je voulais, je pourrais écrire un essai bien plus convaincant que cette esquisse, sur la "langue du football".
Je pense, en outre, que l'on pourrait aussi écrire un bel essai intitulé : Propp appliqué au football ; parce que, naturellement, comme toute langue, le football a une phase purement "instrumentale" rigidement et abstraitement réglée par son code, et une phase "expressive".
On peut avoir un football apparenté à un langage fondamentalement en prose et un football apparenté à un langage fondamentalement poétique.
Notez bien qu'entre la prose et la poésie je ne fais aucune distinction de valeur ; ma distinction est purement technique.
Pour des raisons de culture et d'histoire, le football de certains peuples est fondamentalement en prose : prose réaliste ou prose esthétisante (ce dernier cas est celui de l'Italie), alors que le football d'autres peuples est fondamentalement en vers.
Il y a dans le football des moments qui sont exclusivement poétiques : il s'agit des moments du "but".
Chaque but a un caractère inéluctable, est foudroiement, stupeur, irréversibilité.
Telle la parole poétique.
Le meilleur buteur d'un championnat est toujours le meilleur poète de l'année.
Le football qui exprime le plus de buts est le football le plus poétique.
Le "dribble" aussi est en soi poétique (même s'il ne l'est pas "toujours" autant que l'action du but). En effet le rêve de tout footballeur (partagé par chaque spectateur) c'est de partir du milieu du terrain, de dribbler tous ses adversaires et de marquer le but. Si dans les limites admises, on peut imaginer dans le football une chose sublime, c'est justement cela. Mais elle n'arrive jamais (ou presque). C'est un rêve.
Qui sont les meilleurs "dribbleurs" du monde et les meilleurs buteurs ? Les brésiliens. Donc leur football est un football de poésie : en effet, il est entièrement fondé sur le dribble et le but.
Le bétonnage et le une-deux est un football en prose : en effet il est fondé sur la syntaxe, c'est à dire sur le collectif et organisé : c'est à dire sur l'éxecution raisonné du code. Son seul moment de poésie c'est le contre-pied, avec le "but" qui suit (qui, comme on l'a vu, ne peut-être que poétique).
Bref, le moment poétique du football semble être (comme toujours) le moment individualiste (dribble et but, ou passe inspiré).
ROSESTELLA as-tu déjà entendu parler du football comme ça ?
Rosestella pardonne moi d'avoir violé tes règles.