Stephen Butchard est connu pour son travail de scénariste de la série "The House of Saddam".
Pour préparer l'écriture de Five Daughters, il s'est rendu à Ipswich afin de parler aux familles des victimes (3 des 5 familles ont ainsi contribué activement au projet), à la police et aux membres des associations locales s'occupant des toxicomanes.
Pourquoi avez-vous souhaité raconter cette histoire ?Tout le monde s'en souvient, c'est arrivé il n'y a pas longtemps.
Je me suis juste demandé "qui étaient ces filles ?"
Ce fut un élément clé... tout ce que nous avons vu, à la télé ou dans les journaux, ce sont les photos des filles. (...) Je me suis intéressé à qui elles étaient, à ce qui les a amenées à devenir ce qu'elles étaient, et à ce qui c'est passé le jour J.
Quel souvenir gardez-vous de ce qu'on racontait aux infos à l'époque ?J'étais abasourdi par les événements.
Mais quand c'est terminé, on oublie tout ça rapidement. Je n'imaginais pas une minute que je voudrais en faire une série dramatique.
En parlant avec les familles, j'ai réalisé que c'était une lourde responsabilité de transposer une histoire vraie à l'écran.
Ce fut comment, de rencontrer les familles ?Je ne savais pas du tout à quoi m'attendre.
Elles étaient prêtes à parler et elles comprenaient ce que nous essayions de faire.
La première chose que j'ai dite fut "parlez-moi de votre fille".
Non pas "parlez-moi de votre fille, qui était droguée et prostituée", mais "parlez-moi de votre fille, quand elle était petite, quand elle allait à l'école, qu'est-ce qui l'intéressait, quelles étaient ses ambitions ?".
Il était important pour moi, en tant que scénariste, d'en apprendre sur la personne.
Nous en sommes naturellement venus à parler des drogues et des derniers jours des filles.
Comment les familles ont-elles été affectées par la couverture médiatique ?Ce fut un privilège pour moi qu'elles soient disposées à me parler.
Le plus merveilleux, c'est qu'elles me parlaient honnêtement.
Elles étaient tout à fait conscientes que leurs filles étaient toxicomane et elles savaient ce qu'elles faisaient pour se payer la drogue.
Les familles étaient désolées que ces gens, qu'elles connaissaient et aimaient, finissent avec l'étiquette de droguées.
Quand la presse s'empare d'une histoire, des contre-vérités apparaissent. Ce que les familles voulaient, c'était dire ce que leurs filles étaient vraiment.
Le fait qu'elles soient prostituées ne signifiait pas qu'elles étaient des monstres et qu'elles avaient franchi certaines limites.
Quels genres de détails personnels avez-vous obtenu des familles ?Personne n'avait auparavant parlé à la mère d'Annette Nicholl, et elle les a informés qu'ils avaient trouvé un livre contenant ses poèmes.
J'ai demandé à la famille si je pouvais le voir, mais elle décida que c'était trop personnel, je leur ai donc demandé de quoi elle parlait.
Ils me dirent qu'elle écrivait sur la famille et la nature, le genre de choses qu'une jeune femme peut écrire.
Mais elle avait aussi écrit sur le fait de faire le trottoir, sur la solitude et la honte qu'elle ressentait.
Ça m'a semblé particulièrement important.
J'ai donc demandé l'autorisation d'écrire quelques poèmes au nom d'Annette. Et le résultat dans le film fonctionne bien, ça étoffe sa personnalité.
Pourquoi avoir utilisé des images tirées des infos dans la série ?Nous avons regardé les reportages et en sommes venus au consensus qu'il serait préférable de mettre de vraies images.
Cela a contribué à renforcer le sentiment de peur s'immiscant dans les rues et de pression sur la police.
Les évènements n'étaient-ils pas trop récents pour en faire une série dramatique ?Ça m'a rassuré quand la mère de Paula a dit qu'elle ne voulait pas que les gens oublient sa fille.
Je ne crois pas que leur douleur puisse disparaître, que ce soit au bout de 3 ans ou de 5...
L'important, c'est qu'elles aient supporté le projet.
Si elles ne l'avaient pas fait, il n'aurait probablement pas abouti.