En France en 1994, Amin, parisien d'adoption, retourne en été dans le Midi de la France où il a passé sa jeunesse chez ses parents qui tiennent un restaurant tunisien à Sète. Amin retrouve sa famille et ses amis de jeunesse, comme son cousin dragueur Tony ou sa meilleure amie Ophélie ; il passe son temps entre le restaurant familial, les bars du coin et la plage où viennent bronzer de jolies vacancières. Alors que Tony a du succès, Amin est plutôt timide. Il se trouve une occupation en photographiant la côte méditerranéenne dont il trouve la lumière fascinante.
Le néo-réalisme a toujours été l'un des genres, si ce n'est le genre, que j'aime le moins au cinéma. Je déteste les films qui racontent une tranche de vie, où on ne dit pas grand chose en soi.
Pourtant, quand j'ai découvert Kechiche avec Adèle, je suis tombé amoureux de ce cinéma. Son cinéma me rappelait beaucoup Malick, l'onirisme en moins, car lui arrivait à ancrer l'onirisme dans la réalité et à créer des moments de pure grâce. Par exemple, la scène de la rencontre amoureuse dans Adèle est à mes yeux l'une des plus belles rencontres au cinéma.
Son néo-réalisme n'était pas chiant, c'était un néo-réalisme magnifié, un cinéma qui raconte tout en ne disant rien. Kechiche arrive à capter la vie comme peu de cinéastes, ou du moins, peu à ma connaissance.
Donc son cinéma me rappelait énormément ce Malick qui est en quelques sortes né avec Tree of Life, où plein de petits moments de rien du tout trouvent un sens grâce au montage et racontent quelque chose, racontent la vie. Malick fait virevolter sa caméra et lui donne un aspect spectral quand Kechiche décide d'aller plus loin dans le néo-réalisme, dans le cinéma vérité, et d'embrasser complètement le concept de caméra-oeil de Dziga Vertov - qu'il cite carrément dans Mektoub avec une scène de naissance - qu'il avait inventé avec L'homme à la caméra.
Parfois, on a l'impression d'être dans l'oeil du réalisateur et parfois dans celui de son personnage principal qu'on devine être inspiré par Kechiche. On voit ce que Kechiche veut voir, et ce qu'il nous force parfois à voir.
Et, à l'instar de Malick qui a fait du sous-Tree of Life depuis sa Palme, on a l'impression que Kechiche fait du sous-Adèle.
On a cette impression immédiate avec cette scène de sexe interminable et très provocante, l'air de dire "vous avez polémiqué là-dessus pour Adèle, alors je vais faire exactement pareil et ce, dés le début du film". Mais ce que cette scène nous raconte surtout est qu'à l'instar du personnage principal, on va être obligés d'adopter l'oeil voyeuriste que Kechiche veut nous faire avoir. Et on passe alors 3 heures à voir des culs filmés en gros plans, en maillot, en shorts trop courts, en survêtements, ou directement nus.
Et ce n'est malheureusement pas la seule overdose que Kechiche veut nous faire avoir. Si j'ai commencé par dire combien je ne supportais pas le néo-réalisme, qu'il soit italien ou français, c'est parce que ce film m'a rappelé les raisons pour lesquelles j'avais fui ce genre pendant tant d'années après avoir compris qu'il n'était définitivement pas pour moi.
Je ne vais pas au cinéma pour voir et entendre des choses de mon quotidien. Et je n'ai pas retrouvé dans Mektoub le néo-réalisme magnifié de Kechiche parce qu'il a pris la décision de ne strictement rien raconter. Pas la moindre chose. Le film est une succession de conversations que, personnellement, je fuis comme la peste dans la vraie vie. Qui baise avec qui, qui trompe qui, qui est jaloux de qui. Des conversations de lycéens.
La nostalgie que Kechiche essaie d'installer n'a provoqué que du dégout chez moi. Peut-être que ces conversations ne me sont pas assez étrangères ou éloignées pour que je puisse être nostalgique, j'en sais rien.
Et je dis pas. Lorsqu'il ne pose pas sa caméra sur un cul en gros plan, Kechiche filme ces conversations (et pire encore, les monte) comme personne. On ne peut que s'incliner. Et on ne peut qu'avoir une énorme impression de gâchis. Et elles sont interprétées avec tellement de talent qu'on a souvent l'impression d'exister avec ces personnages, de vivre avec eux, de regarder un documentaire, ou une télé-réalité qui pourrait être au Festival de Cannes. Mais ce vide. Ce vide dans le scénario. Dans les dialogues. Ce film qui ne dit rien et surtout qui ne raconte rien.
Adèle était un parcours initiatique, une jeune fille qui devient femme, qui connait l'amour, qui connait la tristesse, qui grandit. Et alors, toutes ces scènes du quotidien ne semblaient jamais durer trois plombes parce que le film avait un but, un propos. Ici, il n'y a rien.
Rien du tout. Des scènes interminables réalisées par un maitre qui éblouit de son talent quand il n'est pas occupé à avoir un regard voyeur, malsain, et pervers sur ses actrices. Des dialogues éreintants, lassants, épuisants, jusque l'overdose encore une fois, clamés par des acteurs tous plus fabuleux les uns que les autres, et tous plus beaux les uns que les autres quand Kechiche filme leurs visages, leurs sourires, le soleil qui transperce leurs cheveux, leurs épaules.
Ca me laisse une impression d'énorme gâchis, mais surtout, ça me confirme que ce cinéma-là n'est pas pour moi.
-- J'AIME FINALLY
Holding out for a hero ?
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