Tristesse. Tout était là pour faire de ce film un événement, et la déception n'en est que plus grande. La faute à une idée, le lieu principal du film, qui en réduit considérablement l'échelle et la portée alors que ce film aurait dû être l'apothéose de la trilogie des supers de M Night Shyamalan.
Le point fort de cette franchise, puisque c'en est une, reste les personnages, spécialement les 'vilains', aussi fascinants que bien interprétés. Il est alors d'autant plus frustrant que MNS ne sait visiblement pas quoi faire de ses personnages. Je l'imagine se gratter la tête à se demander comment conclure son histoire après le succès de Split - je ne peux pas croire que ce soit la conclusion qu'il ait imaginée dès l'écriture d'Incassable. Contingences de production, budget limité, imagination en berne ? Quelles que soient les raisons, le résultat fait pâle figure après les deux précédents films de cet univers.
Vraiment dommage de gâcher de tels personnages, surtout au regard de leur qualité d'interprétation, spécialement James McAvoy qui accomplit de nouveau une prestation absolument fantastique, encore meilleure que dans Split - Bruce Willis étant lui de nouveau aux abonnés absents, en même temps que son envie d'être là.
Rien qu'en terme visuel, en dépit d'une introduction assez exaltante et de quelques plans bien troussés, on sent une économie d'effets qui dénote avec le propos. Aucun des personnages ne nous est introduit de manière inventive, ils le sont tous sans fanfare d'une façon aussi expéditive qu'anti-iconique. Bien sûr, on apprécie de savoir ce qu'ils sont devenus (Casey a fait mettre son oncle en prison, Dunn continue de mettre ses pouvoirs au service des autres avec l'aide de son fils), mais je m'attendais à moins de banalité dans cette présentation.
Quant au lieu principal, il s'agit donc d'un hôpital aux employés les plus stupides du monde, et aux décisions de sécurité toutes plus incompréhensibles les unes que les autres : pour le génie du crime, on met des caméras partout sauf dans sa chambre apparemment (laquelle ne contient accessoirement aucun lit, je ne pense pas qu'il soit très bon pour un patient de le laisser continuellement assis dans un fauteuil roulant), et on ne juge pas opportun de fermer sa porte à clé puisqu'il est mutique (mais pas paralysé, donc POURQUOI).
On nous promet à plusieurs reprises un final épique qui n'arrivera jamais : le film est clairement de nouveau un petit budget pour MNS, le décor principal étant un hôpital chichement aménagé (laissant la même impression que les choix de déco minimaliste bizarre de After Earth de sinistre mémoire), et le combat final se déroulant sur un parking anonyme.
Bien que la toute fin redresse quelque peu la barre en nous livrant une poignée d'explications qui justifient (en étant d'humeur bienveillante) certaines des aberrations du script auxquelles on a eu droit jusque là, elle apporte également son lot d'incohérences et de questions sans réponses.
Notamment, si le but de la psy était de leur faire croire à leur normalité et qu'elle y parvenait, ensuite quoi ? Ils étaient relâchés en pleine nature ? Ils étaient envoyés dans une prison normale, en possession de tous leurs pouvoirs ? En hôpital psychiatrique ? Qu'ils se croient humains possédant certaines capacités et non surhumains à part entière ne leur enlèverait pas leurs pouvoirs. Toute cette partie, qui prend au bas mot la moitié du film, n'a en réalité aucun sens.
Et si cette fameuse "Société Secrète" oeuvrant dans l'ombre pour cacher au monde l'existence des Supers existe depuis un moment, ce qui semble être le cas au vu du nombre de ses membres*, on peut s'interroger sur le taux de réussite de la psy qui semble malgré tout être la plus humaine d'entre eux puisque chaque cas finit probablement de la même façon, c'est à dire mal. Ou bien était-ce la première fois que l'expérience était tentée ? Ça n'est jamais clair.
* Je me suis tout de même demandé à quoi ils servaient, tous, et l'intérêt de se réunir dans un lieu public où ils doivent attendre que le dernier civil s'en aille (il se passe quoi si un groupe d'amis fait la fermeture du bar ?), et pourquoi ils se figent tous comme des statues comme à la fin de John Wick 2, et pourquoi s'ils ne font qu'une ville à chaque fois il leur a fallu 20 ans pour débarquer à Philadelphie alors que les exploits de Dunn et les crimes d'Elijah sont connus depuis tout ce temps, et pourquoi...
Quant à l'épilogue à base de vidéo virale censée changer le monde, elle témoigne de la naïveté presque touchante avec laquelle Shyamalan envisage l'Internet d'aujourd'hui. Dans notre réalité, ces images seraient vite démythifiées par les experts autoproclamés de Reddit/Twitter/4chan, et tout le monde serait passé à autre chose dès le lendemain.
Bref malgré un postulat inédit (réunir les univers de deux films de près de vingt ans d'écart) et des prémices intrigants, et après la jolie surprise qu'avait été Split, ce n'est pas encore le retour aux affaires pour le réalisateur de deux grands films et d'une tripotée de productions allant du franchement moyen au carrément médiocre. Il reste une certaine impression de gâchis de l'énorme potentiel d'un univers qui ne sera malheureusement plus jamais revisité. Il faudra se contenter de ça.
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je parles pas au cons sa les instruits
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