FP Unchained
Il faut avouer que c'est assez prodigieux d'arriver à une telle cohérence sur un film de 4h qui a autant été massacré et dont le tournage s'est étalé sur plus de 5 ans. On en vient à se demander quelles scènes ajoutées ont été tournées ou retournées, et lesquelles existaient déjà. A part celles concernant la fameuse moustache, et l'épilogue, il est difficile de savoir.
Au-delà de ça, le film garde les quelques qualités de la version (littéralement bâtarde) de 2017, à savoir les persos de Flash, Aquaman, et Cyborg. On ressortait de la salle en voulant en voir davantage d'eux, la même impression existe aujourd'hui. Ezra Miller campe un Flash particulièrement cool - bien qu'aucune de ses blagues ne fonctionne, soyons honnêtes - le Cyborg de Ray Fisher est touchant, et Jason Momoa, fidèle à lui-même, est toujours aussi charismatique.
Je conclurai à propos des bons points en parlant du souffle épique que Snyder arrive à insuffler ici et là à son film, même si, paradoxalement, on ne le ressent jamais lors des scènes d'action.
Et si on ne le ressent pas lors des scènes d'action (absolument aucune ne marche) c'est notamment à cause de ce délire de format 1:33. Les scènes d'action, déjà brouillons, sont d'autant plus illisibles à cause de ce format qui ne serait acceptable que dans une salle IMAX, et encore. Ce format ne serait acceptable que dans une salle IMAX (il en existe même pas 20 dans toute la France), sauf que ce foutu film sort sur un service de SVOD, HBO Max, et il est donc destiné à être vu à la maison, sur une té-lé-vi-sion. Ce format, auquel on ajoute la désaturation que Snyder nous inflige depuis tant de films, et ces effets spéciaux tout bonnement atroces, font que nous sommes spectateurs d'une bouillie numérique du plus mauvais goût et qui a la mauvaise idée de durer 4 heures. 4 foutues heures. 4 putain d'heures.
4 heures qui semblent facilement en durer le double, compte tenu que Snyder a eu l'excellente idée de nous foutre un premier acte d'exposition de 2 bonnes heures. Il était évident que c'était une mauvaise idée de faire un film de 4h, et que nous pouvions nous douter que des problèmes de rythme seraient de la partie. Mais je n'aurais jamais pu imaginer que j'allais me taper 2 putain d'heures d'exposition. C'est tout simplement inconcevable. Et si les deux heures suivantes, respectivement le deuxième et le troisième acte du film, sont à peine plus regardables et plus rythmées, ça n'efface en rien l'ennui et le dégout provoqués par cette intro longue comme la mort.
Pour le reste, on sait à quoi s'attendre avec Snyder. Et c'est exactement ce à quoi nous avons droit. Tout est beaucoup trop grave et trop dark sans raison (un petit "fuck the world" est même glissé à un moment), et ce, dés la première scène. Il y a toujours des choix musicaux complètement à la ramasse et franchement énervants, qu'on peut par moments ressentir comme des provocations. Ça se prend beaucoup trop au sérieux alors que ce n'est pas loin d'être son film le moins bien réalisé, et, nouveau défaut qu'on lui découvre depuis ces derniers jours avec le meme du Joker, il se permet de jouer au parfait petit troll. Ainsi, lorsque *Hallelujah* est choisi comme générique de fin, difficile de ne pas le prendre comme un énième crachat à la gueule. On aurait d'ailleurs presque envie de citer la chanson à Snyder lui-même, tant ses choix musicaux continuent d'être discutables, film après film : *you don't really care for music, do ya ?*
Pour autant, nous allons tous répondre à la même question : cette version est-elle vraiment meilleure que celle de 2017 ? Etait-elle vraiment nécessaire ?
Bien que n'ayant jamais été un fan de Snyder - on pourrait même me considérer comme un détracteur, vu que je n'aime rien de lui à part ses deux premiers films, mais ça impliquerait que je ne suis pas de bonne foi devant les suivants, et j'ose espérer que cette critique prouve le contraire - j'ai toujours pensé qu'il fallait sortir cette version, aussi bien parce que Snyder en avait littéralement besoin d'un point de vue thérapeutique que parce que je le considère comme un auteur, et que je préfère voir le film d'un auteur plutôt que celui de deux réalisateurs qui ne se sont jamais parlé et dont le travail commun est massacré par une tierce partie : le studio. A mes yeux romantiques, le film de 2017 n'aurait jamais dû exister. Mais il existe, pour notre plus grand bonheur, et on en rigole depuis 4 ans maintenant.
J'aurais du mal à la considérer comme véritablement meilleure tant certains passages (pour ne pas dire délires) dont je n'ai pas parlé pour que cette critique soit le plus spoiler-free possible m'ont donné envie d'arrêter le film et m'ont énervé au plus haut point. Le principal défaut scénaristique de la version de 2017 qui racontait que Superman à lui seul est plus fort que les cinq autres membres de la Justice League réunis existe toujours et il est même amplifié. En plus de cela, Batman est toujours d'une inutilité sans nom, on se demande assez souvent si Snyder avait véritablement envie de le mettre dans son film tellement il erre telle une âme en peine jusqu'à ne même pas participer au combat final. Et lorsque je parlais de crachat à la gueule pour le générique de fin, ce n'était malheureusement pas le seul : le film en est rempli, c'est un festival de bons gros mollards. A tout cela, on peut ajouter un fan-service beaucoup trop présent (le film est d'ailleurs truffé de caméos trop souvent inutiles, du style Joe West au 4ème plan d'un shot qui dure moins d'1 seconde) qui perdra un trop grand nombre de spectateurs qui ne connaissent pas cet univers sur le bout des doigts et qui seront complètement laissés pour compte devant beaucoup trop de scènes et, surtout, devant l'épilogue.
Cependant, il faut avouer que la promesse (un des trop nombreux passages de fan service) faite dans ce film est pour le moins audacieuse et intéressante, et que ça me donne envie de voir la suite. Mais je n'ai pas envie de la voir dans ces conditions. Je n'ai pas envie de la voir avec un Zack Snyder qui est complètement hors de contrôle, en roue libre, et à qui on laisse passer toutes les lubies.
Alors, meilleure ou pas, encore une fois ? Je dirais que les deux versions sont mauvaises, mais que celle de 2017, aussi ridicule, moche et nanardeuse soit-elle, infiniment plus que celle-ci, je l'avoue, avait au moins le mérite de ne pas durer 4h, de ne pas perdre le spectateur lambda, et de ne pas se foutre ouvertement de la gueule de ses détracteurs. Maintenant, elle est enfin sortie, après 4 ans de hashtags et de pétitions, elle est enfin sortie. Peut-on enfin passer à autre chose et la laisser définitivement derrière nous ? Allez, tous ensemble, crions "Dostoevsky" à cette Snyder Cut.
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J'AIME FINALLY
Holding out for a hero ?
J'AIME FINALLY
Holding out for a hero ?
*édité à 05:20 le 18/03/2021